Critique - Jupiter : Le destin de l'Univers

C'était l'un des évènements du dernier Festival de Gérardmer : la présentation en avant-première du blockbuster Jupiter : Le destin de l'Univers. Un film qui tranchait avec le reste des longs-métrages projetés, rien que pour son imposant budget et son incroyable univers graphique annoncé. Rien d'étonnant quand on sait que Jupiter est l'oeuvre de Andy Wachowski et Lana Wachowski, les créateurs de Matrix, Speed Racer et Cloud Atlas. Voir les deux revisiter le genre du space-opéra, voilà qui devrait annoncer un beau spectacle sur grand écran. Hélàs, un beau spectacle ne fait pas toujours un bon film.

Ne nous trompons pas : nous aurions aimé adorer Jupiter - Le destin de l'Univers. Un film de science-fiction aussi ambitieux qui ne soit pas une adaptation ou une suite, c'est assez rare pour retenir toute notre attention. Et à la sortie de la séance, on a été bluffé par son univers graphique. Passons sur le look particulier de certains des personnages, les différents décors/monstres/aliens les rattrapent donnant au film un aspect absolument unique. Presque trop riche - à la limite du répulsif, l'univers est le lieu de scènes d'action incroyables servies par des effets spéciaux démentiels.

Connaissant leur héritage, les Wachowski n'ont plus à faire leurs preuves en la matière et confirment ce que l'on savait déjà : ils sont plus que doués pour tout ce qui touche à l'action. On regarde ébahis les acteurs du film s'affronter, se projetant dans les airs comme ils le feraient dans l'imagination fébrile d'un jeune enfant. On pourrait sans mal voir le film comme un immense terrain de jeu où les réalisateurs s'en donnent à coeur joie en projetant toutes leurs ambitieuses idées. La musique est un élément essentiel de la partie, Michael Giacchino y propose l'un de ses meilleurs thèmes, révisité tout au long d'une bande-originale pour le moins épique.

En lisant tout ce qui précède, on pourrait penser que les Wachowski ont réussi leur coup et nous livrent un nouveau monument à la hauteur de leur filmographie. Mais ce serait ne pas plonger dans les détails de l'histoire et de ses personnages. Car ce qui gêne le plus dans Jupiter c'est qu'on n'arrive jamais à se projeter totalement dans le film. Les réalisateurs ont conçu un univers dense dont on ne voit que la surface et qui, au final, peine à nous embarquer et à nous convaincre totalement. Aucune émotion, aucun frisson, le film se regarde sans jamais réussir à nous emballer. On a le plus souvent l'impression d'être devant une mauvaise série Z à laquelle on aurait donné trop d'argent. C'est pour ainsi dire tout le bien que l'on pense de l'histoire, confuse, qui se veut faussement complexe pour cacher une trame des plus classiques, et mal traitée pour ne rien arranger.

Là où le bât blesse le plus, c'est pour les personnages auxquels on ne s'accroche jamais. Ne parlons même pas de l'alchimie inexistante entre les deux héros du film. Mal écrits, au développement des plus limités, ils décrivent l'une des pires romances du cinéma moderne. Ca sort de nulle part et ce n'est pas crédible une seule seconde. On a de la peine pour Channing Tatum en lutin volant et Mila Kunis en récureuse de toilettes, tandis que d'un autre côté on a un Eddie Redmayne agonisant qui peine à représenter la quelconque menace.

Alors oui, Jupiter - Le destin de l'Univers est l'un des films les plus ambitieux visuellement des dernières années et oui, les scènes d'action sont géniales (la 1ère et la dernière en particulier). Par contre, malgré les Wachowski à la barre, le film souffre des mêmes problèmes que les récents blockbusters de la Warner (Godzilla et Pacific Rim en tête), à savoir un scénario et des personnages catastrophiques. A partir du moment où cela représente la base d'un bon long-métrage, Jupiter s'écoule pour ne devenir qu'une bouillie d'effets devant laquelle on s'ennuie terriblement.