Critique - Into The Woods de Rob Marshall

Publié le 27 Janvier 2015

Critique - Into The Woods de Rob Marshall

À travers un regard résolument moderne et décalé, Into The Woods, Promenons-nous dans les bois revisite quelques-uns des plus célèbres contes de fées. Les intrigues de plusieurs histoires bien connues se croisent afin d’explorer les désirs, les rêves et les quêtes de tous les personnages. Cette comédie musicale aussi enjouée qu’émouvante suit Cendrillon, le Petit Chaperon rouge, Jack et le haricot magique et Raiponce, tous réunis dans un récit original où interviennent également un boulanger et sa femme qui espèrent fonder une famille, mais à qui une sorcière a jeté un mauvais sort…

Pour découvrir l'incroyable histoire du musical, cliquez ici.

Plus de 25 ans après ses débuts sur Broadway, Into the Woods a finalement le droit à son adaptation cinématographique. Non sans une certaine ironie, le musical - qui se voulait une version critique des "ils vécurent heureux" - se retrouve transposé à l'écran par Disney. A la réalisation, un homme qui n'a plus à démontrer ses talents en la matière depuis Chicago, à savoir Rob Marshall. Point le plus important, on retrouve derrière le film le duo original de Broadway avec James Lapine à l'écriture du scénario, Stephen Sondheim à celle des musiques. Une combinaison parfaite alliée à un cast d'exception : Meryl Streep, Emily Blunt, Anna Kendrick, Chris Pine et Johnny Depp pour ne garder que les plus connus. L'équation donne-t-elle un bon résultat ? Into the Woods est-il la nouvelle grande réussite de Rob Marshall ?

Critique - Into The Woods de Rob Marshall

Dès le début, le film reprend la même structure que le musical à commencer par un gigantesque morceau musical - comptez 20 minutes - chargé d'introduire les différents personnages de l'univers. On y retrouve plusieurs figures mythiques des contes les plus célèbres tels Jack (et le haricot magique) ou le Petit Chaperon Rouge. Le premier est chargé d'aller vendre la vieille vache familiale, la seconde est en route pour la maison de sa Mère-Grand. Chacun y va de propre voeu personnel, la comptine qu'ils entonnent rythmée par de multiples "I wish" (je souhaite). On y croise aussi Cendrillon, maltraitée par sa belle-famille alors qu'un bal se prépare, et un couple de boulangers qui rêve plus que tout d'avoir un enfant. "I wish" Tout ce petit monde se prépare pour un périple qui va les mener "dans les bois". Une introduction absolument formidable qui pose d'amblée les bases pour le film, lequel conservera tout du long ce côté choral, mais aussi une bonne dose d'humour.

Pièce maitresse de l'ensemble : le personnage hystérique de la Sorcière, qui afin d'accorder un enfant au boulanger et sa femme, leur demandera de réunir divers objets. Cette quête va permettre à tous les personnages précédemment cités de se croiser au détour des bois, le tout en chanson ! Une relecture originale des contes que l'on connait tant, et qu'on se surprend à redécouvrir sous un autre jour. C'est dynamique, le rythme se maintient, avec des éclats de rire et de bonnes trouvailles, tout cela ponctué de somptueuses reprises des classiques du musical. Pour les nouveaux spectateurs, c'est l'occasion de découvrir certains des joyaux de l'écurie Sondheim : des chansons qui ne plaisent pas forcément à la 1ère écoute, mais qui une fois digérées dévoilent des qualités absolument superbes. Il en est de tel pour Giants in the sky, sublimée à l'écran, ou encore I Know Things Now. Les paroles sont parfois à double sens, ce qui offre plusieurs niveaux de lecture au film. On pense notamment au loup prédateur incarné par Johnny Depp.

Critique - Into The Woods de Rob Marshall

Parmi les acteurs, Johnny Depp est sans doute le plus surprenant de tous. Malgré un rôle restreint (cinq-six minutes au compteur), il impose son empreinte et livre une interprétation délicieuse en Grand Méchant Loup. La mise en scène avisée de Rob Marshall n'y est pas pour rien. Face à lui, Lilla Crawford - la Annie de Broadway - porte le Chaperon Rouge. Daniel Huttlestone (Les Misérables) est quant-à lui Jack. Encore une fois, deux excellents choix. Il y aurait en fait peu de choses à remettre en cause au niveau du casting tant chacun semble destiné au rôle qui lui a été confié. Cela inclus Anna Kendrick qu'on ne s'imaginait pas à première vue en Cendrillon. Même James Corden qui semblait le plus faible sur la bande-originale dévoile un jeu charmant qui fait de lui le parfait Boulanger. En parlant de "charmant", venons-en à Chris Pine dont l'interprétation du prince a fait hurler de rire la salle tout entière, sans parler de son duo de princes avec Billy Magnussen. Vous ne verrez plus jamais l'acteur de la même façon.

Tellement d'acteurs à mentionner qu'un second paragraphe s'impose. Et impossible de démarrer celui-ci autrement qu'avec Meryl Streep. Nommée à l'Oscar du meilleur second rôle, elle a été mise en avant lors de la promotion du film, à juste titre puisqu'en plus d'occuper une position centrale dans le rôle de la Sorcière, elle livre une prestation saisissante, possédée du personnage. Ses interprétations de Stay with me et de Last Midnight constituent deux des grands moments du film, touchant pour l'un, d'une forte intensité pour l'autre. Aussi nommée pour des récompences, Emily Blunt avec un rôle plus important qu'il n'y parait et empreint d'une grand sensibilité. On vous avait dit que le casting du film était parfait, ne vous étonnez donc pas que tout ait été très positif. Hélàs, il y a également quelques petites à reprocher au film.

Critique - Into The Woods de Rob Marshall

Ces points négatifs se situent au niveau d'une grosse partie de l'intrigue. Comme dans le musical, un brusque changement intervient au milieu de celle-ci, bousculant d'une seule fois tous nos personnages. Vous serez sans doute surpris des "sentiers" alors empruntés. Cette seconde partie était la plus faible sur scène et elle le reste à l'écran, tranchant avec un rythme beaucoup plus lent où l'ennui manque de pointer le bout de son nez. Heureusement, quelques chansons viennent donner un peu d'aplomb à ce final un brin morose. Tout du long, le film reste toutefois très fidèle au musical, gardant aussi bien les passages les plus osés que les plus sombres. Les rares changements du second acte tendant à l'améliorer, et la première partie étant elle-même moins fouillie, on ne peut que saluer le travail d'adaptation, qui sans trahir l'oeuvre originale, lui permet de mieux passer le cap du grand écran. Même les passages coupés trouvent une résonnance - intrumentale ou par les dialogues - dans le film.

Visuellement, c'est superbe, d'autant plus quand on sait que le budget global est de 40-50 millions de dollars (incroyablement bas par rapport au rendu à l'écran). Les décors et les costumes rendent justice au musical qui se voit afflublé de quelques effets spéciaux eux aussi très réussis. On est plongé dans ces bois (où se déroulent une bonne partie de l'aventure) et on n'en ressort plus jusqu'au final. Ajoutons à cela le dynamisme de la caméra de Rob Marshall, qui comme il l'avait prouvé sur Chicago sait parfaitement s'adapter aux chansons.

Critique - Into The Woods de Rob Marshall

Into the Woods a été l'un des succès du Noël dernier aux Etats-Unis avec plus de 120 millions de dollars engrangés sur le territoire américain. Un beau score qui le place dans les 5-6 plus gros succès de comédies musicales. Reste maintenant à savoir si la France se laissera tenter. Disney sortira le film sur 178 copies, certaines en VOST intégrale, d'autres en VF sur les dialogues, lesquels représentent approximativement 15% du film. Si le casting et la relecture chorale des contes de fées peuvent séduire, il n'en est pas de même pour la musique, qui risque de rebuter une bonne partie des spectateurs. Si toutefois vous parvenez à apprécier les chansons de Sondheim, vous passerez un excellent moment. En soit, Into the Woods est une adaptation parfaite du musical. Aucune fausse note dans le casting, une très bonne réalisation et la musique de Stephen Sondheim y est sublimement retranscrite. "I wish.."

Critique - Into The Woods de Rob Marshall
Commenter cet article